LE MONDE | 09.10.08http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/10/09/les-choix-assumes-de-la-competition-universitaire_1104988_3224.html#ens_id=1105091Pièce après pièce, le gouvernement recompose la scène de l'enseignement supérieur et de la recherche. Les acteurs sont pour l'instant les mêmes, mais les choix de la ministre Valérie Pécresse établissent une hiérarchie des rôles. Aux méritants, les premières places, aux autres, les seconds rôles ou la simple figuration.
"Je veux les meilleures universités dans lesquelles travailleront les enseignants-chercheurs les plus prometteurs", revendique Mme Pécresse. Pour arriver à cet objectif, la ministre utilise les ressorts de l'émulation. La compétition est désormais le credo du ministère.
Premières bénéficiaires, les universités. Les 20 pionnières qui passeront à l'autonomie au 1er janvier 2009 recevront une enveloppe de 250 000 euros. La liste des 16 établissements les plus zélés dans la mise en place du plan pour la réussite en licence a fait l'objet d'une communication particulière. La ministre a prévenu que les moyens futurs seront octroyés en fonction de la réactivité des universités et de leur capacité à répondre au cahier des charges gouvernemental. Le plan campus qui va doter dix sites universitaires de moyens exceptionnels afin qu'ils puissent faire jeu égal avec les grandes universités européennes ou mondiales constitue le point d'orgue d'une volonté de rompre avec une vision égalitariste.
Ce pas vers une différenciation des universités touche désormais les personnels. La décision de Mme Pécresse d'octroyer de meilleures conditions de travail et une rémunération plus attractive aux enseignants et chercheurs les plus brillants est guidée par des ambitions nouvelles. La première est de replacer progressivement les universités au coeur du système de recherche français, en favorisant le rapprochement avec les organismes de recherche. La deuxième est de combler le déficit d'attractivité des carrières universitaires. La troisième enfin est de réunir toutes les conditions pour faire émerger les talents, quitte à établir une hiérarchie implicite entre les personnels.
Pour certains, c'est le basculement vers un système à plusieurs vitesses. Pour d'autres, la fin de l'hypocrisie. Car il y a longtemps que les 85 universités ne couraient plus dans les mêmes catégories ni à la même vitesse. Et le système d'enseignement supérieur public français avait depuis longtemps créé les possibilités de s'arranger avec ses statuts pour récompenser le mérite et tenir la concurrence internationale. La politique engagée par le gouvernement depuis 2007 permet aux acteurs qui le souhaitent d'assumer clairement la compétition des savoirs.
Catherine Rollot