http://www.loreal.com/_en/_ww/fwis/file/fr_DP_2009.pdfProfesseur Tebello NYOKONGLauréate pour l’Afrique et les États Arabes dans les Sciences Physiques« Pour sa contribution à l’utilisation de la lumière dans le traitement du cancer et pour la dépollution des sols. » (citation du jury, grand public)
« Pour son travail sur la photothérapie et la décontamination environnementale combinant colorants organiques et quantum dots. » (citation du jury, public scientifique)
Formation : University of Western Ontario (Ph.D. 1987)
Pays de résidence : Afrique du Sud
Institution : Rhodes University (Grahamstown, Afrique du Sud)
Qui est-elle ?Le Professeur Tebello Nyokong est née au Lesotho. Elle obtient sa Licence ès Sciences (B.Sc.) à l’Université du Lesotho en 1977, ainsi qu’un diplôme d’enseignante (Concurrent Certificate in Education).
Elle poursuit ensuite sa formation au Canada, obtenant sa Maîtrise ès Sciences (M.Sc.) en chimie à
l’Université McMaster en 1981 et son Doctorat (Ph.D.) en Chimie à l'University of Western Ontario en 1987.
De 1987 à 1991, Tebello Nyokong rentre au pays pour enseigner la chimie physique et inorganique à l’Université du Lesotho. En 1991, elle accepte un poste de Maître de conférences à l’Université
de Rhodes en Afrique du Sud et obtient le titre de Professeur en 2001. En 2007, elle est nommée Professeur-chercheur au Ministère sud-africain des Sciences et des Technologies et au National Research Foundation dans le domaine de la chimie médicinale et des nanotechnologies.
Ses travaux de rechercheLe Professeur Nyokong a consacré sa carrière scientifique à la synthèse et la caractérisation
d’un groupe de composés de la famille des phthalocyanines, communément utilisés comme colorants pour les jeans. Deux autres caractéristiques intéressantes, toutefois, ont amené le Professeur
à saisir l’importance médicale de ces composés : lorsqu’ils sont administrés à des patients, ceux-ci
ont tendance à envahir les tissus cancéreux et ils réagissent très fortement à la lumière.
Quelles en sont les applications ?Les résultats des recherches de Tebello Nyokong promettent des applications de grande
envergure dans le domaine médical. Elle a développé de nouvelles variétés de médicaments à base de phthalocyanines, utilisés dans le cadre d’un traitement innovant du cancer appelé thérapie photodynamique. Cette nouvelle méthode utilise les colorants aux phthalocyanines, qui sont inertes
et sans danger, mais peuvent être activés au contact d’un faisceau laser rouge et utilisés pour cibler de façon sélective les tissus cancéreux. Ainsi, contrairement à la chimiothérapie,
les effets du traitement peuvent être localisés. Le traitement offre donc une alternative beaucoup
plus économique et beaucoup moins invasive.
Les recherches du Professeur Nyokong aboutissent également à des applications pour la fabrication
de capteurs de molécules. Ce travail pourrait contribuer au développement de nouvelles méthodes d’identification précoce des maladies.
Par exemple, dans certaines zones rurales d’Afrique du Sud, un lien a été établi entre une forme de cancer de l’oesophage et des toxines présentes dans des produits à base de maïs. La détection de ces toxines permettrait de sensibiliser les populations de ces zones et de prévenir la maladie. Tebello Nyokong participe également à des recherches sur le développement de méthodes
de décontamination environnementale (par exemple des insecticides ou des désherbants),
des travaux connus pour leur complexité et pour lesquels une solution serait extrêmement utile.
Au-delà de ses nombreux projets et de ses recherches pionnières sur la thérapie photodynamique, le Professeur Nyokong est une enseignante qui partage le plaisir d'échanger avec ses étudiants.
Elle se consacre à la formation de jeunes chimistes et reste un modèle d’exception pour les jeunes Sud-Africaines qui se destinent à des carrières scientifiques.
Tebello NYOKONG Par elle-mêmeAlterner l'école primaire et la garde des moutonsJeune fille au Lesotho (un royaume montagneux entièrement entouré par
l’Afrique du Sud), Tebello Nyokong allait à l’école certains jours, lorsqu’elle ne
gardait pas le troupeau. « Lorsqu’on est berger, il faut connaître la nature pour survivre. Même adolescente, on m’a donné des tâches traditionnellement réservées aux garçons. Je pense que l’effet a été positif, puisque j’ai eu l'opportunité d'explorer » note-t-elle.
Des arts aux sciencesSes professeurs de mathématiques et de sciences étaient excellents, mais elle
a été peu conseillée lorsqu’elle est entrée au secondaire. « Parmi mes pairs,
on pensait généralement que les sciences, c’était dur – et donc pas pour
les filles » dit-elle. « Et j’ai fini par le croire. J’ai passé trois ans à étudier des disciplines littéraires, que je n’appréciais pas vraiment. Enfin, deux ans avant la fin du lycée, j’ai décidé d’intégrer un cursus scientifique. C’était risqué de prendre un nouveau chemin, mais j’ai trouvé ma voie ! »
Elle a dû mettre les bouchées doubles pour rattraper son retard. « J’ai passé
des jours et des nuits à lire la physique, la biologie et la chimie, et j’ai dû travailler dur en mathématiques, mais j’ai adoré chaque moment » dit-elle. « J’ai obtenu mon examen d’entrée à la fac avec de bonnes notes, même si je n’ai pas pu suivre les cours tout de suite car j’ai dû travailler pour aider ma famille pendant un an, mon père étant très malade. »
Son père voulait qu’elle étudie pour améliorer ses conditions de vie. « Il croyait
en moi et m’a toujours encouragée, même s’il ne comprenait pas très bien
de quoi traitaient mes disciplines. »
Les plus grands défisEtre mère et doctorante n’avait rien de facile. Plus tard, la solitude académique
a constitué un nouveau défi. « Il n’y avait personne à qui parler de ma recherche, de ses bons et mauvais cotés. Personne pour me guider. Si je trouve le moyen,
je vais m’assurer qu’aucune femme n’ait à subir cela » promet-elle.
Ses recherches ont des applications très concrètes, Tebello Nyokong travaille sur
le développement de médicaments pour traiter le cancer. « Ma bonne étoile
(si je peux l’appeler ainsi) m’a enfin souri lorsque j’ai reçu un appel du National
Laser Center : quelqu’un allait visiter mon université et souhaitait me rencontrer
au sujet d’un prêt de lasers » se souvient-elle. « J’avais essayé de faire des recherches au laser, sans laser, car je ne pouvais pas me les offrir. Ce fut le tournant. J’ai demandé les lasers et je les ai eus. C’était un moment très fort, lorsque le premier test de mes médicaments pour le cancer a révélé une activité forte sur la tumeur. Je savais que j’étais sur la bonne voie ! »
Inspiration, motivation et détermination« Mes étudiants, surtout ceux en master et en thèse, sont ma source de motivation.
Leur goût d'apprendre est pour moi une source d'inspiration. » Une autre source
de motivation pour Tebello Nyokong est son désir de « réussir pour toutes
les femmes, pour tous les Noirs, et pour les Africains dans leur ensemble.
Je trouve que l’Afrique a été dépeinte comme un continent seulement touché par la guerre et la faim, et je veux montrer que ce n’est pas le cas. »
Elle rêve de voir plus d’étudiants choisir des carrières scientifiques. Elle souhaite voir des jeunes aux premières lignes du développement scientifique en Afrique du Sud et plus généralement en Afrique, car beaucoup de
ses étudiants proviennent d’autres pays africains. Sur le plan plus personnel, elle souhaite aider et encourager d’autres femmes à s’engager dans
la recherche, surtout des jeunes, pour qu’elles puissent bénéficier de modèles et pour « rompre le cercle de l’isolement. »